Retour à la page d’accueil : Emmanuelle Pépin et Lionel Garcin
Texte « dit » de la conférence/performance
par Emmanuelle Pépin
LE SON – l’écoute – LE GESTE
Dans l’Improvisation
Emmanuelle Pépin, danse et textes, Lionel Garcin, musique
Cefedem AuRA, Lyon, le 24 janvier 2023
Transcription à partir de la vidéo de la conférence/performance :
Jean-Charles François.
Vidéo à 8’59”
Le son
Le geste
Danse et musique sont reliés indéniablement.
Plus précisément mouvement et son, ou plutôt musicien et danseur.
Chacun d’eux tire leur origine du corps, d’un corps conscient, d’un corps vivant.
Sons et mouvements jaillissent à partir d’un acte de présence, d’un acte d’écoute.
Tout est là, au creux de soi. À portée.
La danse crée du son, naît du son même – un lointain au-dedans de soi, souffle, un battement, un élan vital.
Le son vient d’un instrument qu’une personne joue, il provient du corps, d’un mouvement, le son est mouvement. Mouvement « résonnement » visible.
Dans une pièce improvisée, danse et musique jouent ensemble dans le même espace, l’espace invite, l’espace écoute.
Il est évident que des composantes comme le rythme, la durée, la texture, les hauteurs, volumes, notes, silence, mélodies, point d’attaque, contre-temps, impact, résonance, arrêt, saccade, pré-mouvement, énergie, pulsation, tempo, sources sonores, propagation, direction du don dans l’espace, partitions, scores, entrées-sorties, superpositions, entrelacements sont des éléments avec le danseur joue. Le musicien aussi.
Le musicien peut aussi accompagner le danseur, le danseur peut accompagner le musicien, musiciens et danseurs peuvent s’accompagner ensemble, ou pas.
Attention portée, avec ce regard d’enfant, sur les phénomènes.
Contemplation.
Qu’est-ce que le son change ?
Qu’est-ce que le geste change ?
Comment l’espace change ?
État des lieux.
Le lieu. L’architecture.
Dans le lieu.
Imaginaire.
Le temps des mouvements avec lesquels on joue…
Vidéo à 15’03”
La danse, c’est l’art du mouvement en silence
La musique, c’est l’art du silence en vibrations audibles
La danse est l’art sonore inaudible
La musique est l’art du mouvement sonore, de la modulation visible et audible en même temps
La danse est l’art du geste de l’écoute
La musique est l’art de l’écriture de l’écoute
La danse est la musique de l’élan intérieur
La musique est la voix de l’élan intérieur
La danse est la calligraphie de l’espace, dessinant et sculptant des paysages invisibles.
La musique est cette respiration large calligraphiant l’air, dansant avec lui, dessinant des paysages sonores et invisibles
La musique s’écrit dans l’espace elle le sculpte
La danse, en composition instantanée, c’est comme se laisser vivre par l’espace du vide
Danse et musique se situent là
ensemble, ou plutôt en même temps
sans pour autant « jouer harmonieusement ensemble ».
Danse et musique, sons et mouvements, jouent ici de l’évidence
non rationnelle, intuitive, sensible,
imaginaire, poétique,
absurde
Vidéo à 19’06”
Le son touche l’espace
La peau est touchée par l’espace
Double mouvement
Toucher
Être touché en même temps
La vibration du son voyage dans l’air
La peau, membrane flexible, poreuse qui sépare le monde intérieur, qui le relie au monde extérieur
La peau écoute
reçoit
la température, la lumière, l’humeur
Le mouvement déplace l’air,
le frictionne, le traverse, s’appuie sur l’air
Le geste transforme l’espace
Le son transforme l’espace
Le son touche l’espace
La peau touche le son
Le son touche la voix
C’est physiologique
élasticité, intensité
Milliards de petits trous constituent ma peau
Dès lors que mon corps est touché
tout le reste est touché
Écouter par la peau est subtile, global, inhérent
Le danseur sait cela
le corps du danseur, le corps aussi du musicien
Vidéo à 23’12”
Couches superposées en termes d’espace,
L’écoute est changeante, les pensées bougent
la perception du son est bougée
C‘est évident
on n’écoute pas de la même manière
Ma peau écoute, mon oreille écoute
Entonnoir, en forme de spirale qui laisse passer les vibrations
Petits récipients …
En équilibre
ou en déséquilibre…
Souffles, battements, pulsations
Le corps à nu, le corps est son, vivant
Impact
Ligne de son
Vidéo à 26’10”
Le silence entre les sons
La durée des sons
La durée d’un geste
Cette temporalité
Sentir, saisir, construire,
déconstruire
imaginer, réinventer
Une poétique de l’instant
Être là
Sous nos yeux
Écoutons cet espace, écoutons cet espace sans bouger
assis, debout, dans l’immobilité
Écoutons le phénomène
Écoutons notre respiration
Nos battements
Écoutons nos rythmes au milieu des sons de l’espace tout autour
Écoutons l’espace en train d’écouter
Écoutons le tout comme une large partition de sons qui cohabitent ensemble
qui participent ensemble
Notre présence au cœur
L’improvisation est l’expérience de la découverte.
Nous découvrons la découverte en même temps que nous nous découvrons. L’improvisation est l’expérience du dévoilement.
Une embarquée
Un voyage, une écriture
Des migrations de mémoires-vivantielles qui nous deviennent, nous animent, nous ramènent l’ailleurs dans les tissus de nos corps, nous déshabillent et nous rhabillent.
Car n’est-il pas une mise à nue si nue que de se dépouiller de ce qui nous fait, pour nous laisser « porositer » d’un mystère innommable, nous laisser bouger par ce qui échappe, nous saisit ? Nous laisser devenir un autre-soi sans se perdre non plus,
Sans perdre pied, mais toujours en laissant frôler-frolattrer en nous cette folie, cette fantaisie irrationnelle permise ici dans le maintenant de l’écoute large, dans ce jeu d’enfant grand.
L’écoute est un acte
L’écoute est au milieu
Tout réside dans l’attention portée
Le moindre mouvement
Le moindre son proche ou lointain
Au-delà de l’espace-même
Vidéo à 37’09”
La gravité, squelette, matières spongieuses
Travail sur l’état des vibrations
Le squelette résonne
Les vibrations du son traversent la peau, traversent l’épiderme, glissent sur les fascias, glissent sur les muscles, suivent les stries, les ligaments et les tendons.
Les vibrations descendent ou plutôt voyagent, traversent, se faufilent dans les liquides, la lymphe.
Les filaments, les réseaux de communication
Les sons traversent les couches, percutent, sont bousculés, massés.
C’est physiologique
Les articulations laissent passer les informations
Circulation du son, de l’énergie, du mouvement dans les moindres recoins.
Vidéo à 39’36”
Le corps est touché par le son
L’énergie du corps échauffe le corps
La température enfle
La peau transmet à l’air l’énergie du mouvement, le mouvement invisible au-delà du corps
Particules
De la matière se dégage de l’air, c’est physique, physiologique
L’air est brassé par le mouvement, par les sons
Sons et mouvements sont reliés indéniablement
Vidéo à 42’48”
Lignes de son
Danse comme une manifestation dynamique du vide
L’essence du son, l’essence du geste
Le vide immense, chaos phénoménal qui a donné la vie
Colonne vertébrale, oreille, ramifications, articulations
Liberté
L’espace à l’écoute, un lieu d’écoute
Les sons sont entraînés dans un flux, ils jouent dans l’attente joyeuse du mouvement suivant, ils jouent dans les articulations juste le temps de trouver une nouvelle voie
Les liquides, un océan en soi
Des méandres incandescentes, phosphorescentes, lumineuses
L’écoute par les liquides est une écoute mouvante
(…)
… déséquilibre…
…écoute… …maintenant…
…battements…
…pulsations…
Le corps…
(…)
L’espace du rien
Le sourd retentissement